lundi 1 août 2016

F-7 sur l’Afrique


Les bases de l’industrie aéronautique militaire chinoise furent très largement posées entre 1949, année de l’arrivée au pouvoir du parti communiste chinois, et le tout début des années soixante, grâce à un important soutien soviétique.  Le schisme entre Moscou et Pékin interrompit ensuite cette coopération, et l’industrie aéronautique chinoise, isolée de l’extérieur et désorganisée par le Révolution culturelle, stagna pendant une décennie, avant de reprendre un développement qualitatif qui allait l’amener, quatre décennies plus tard, à se montrer capable de produire des prototypes de chasseurs furtifs développés localement, comme le J-20 ou le J-31.   Très tôt, la République Populaire de Chine prit une place importante dans le marché mondial des armements, que ce soit pour des raisons politiques – la rivalité avec l’URSS pour le rôle de pays leader du communisme dans le Tiers-monde joua longtemps un rôle majeur – ou purement mercantiles.  Hors, aborder l’histoire de l’introduction de l’un des principaux armements exportés d’origine chinoise dans une aire géographique spécifique – l’Afrique –  révèle en creux nombre de contraintes avec lesquels doivent opérer nombre de forces aériennes aux moyens limités.



Adrien Fontanellaz 


 

 

De l’original à la copie



Dans les années 50, dans un contexte où la compétition entre  superpuissances s’intensifiait et où les technologies  liées à l’aviation évoluaient rapidement, les Soviétiques développèrent un nouvel intercepteur léger de classe Mach 2, le MiG-21, qui allait donner naissance à plusieurs variantes et dont nombre sont encore opérationnels de nos jours.  Dès 1958, des négociations débutèrent entre Moscou et Beijing portant sur le production sous licence en Chine du MiG-21F-13, la première variante de l’appareil à être entrée en service en grand nombre au sein des forces aériennes soviétiques ainsi que celles de nombre de pays alliés.  Un accord définitif fut conclu entre la Chine et l’URSS en 1961, portant sur les transferts de technologie nécessaires à la production du MiG-21F-13 ainsi que celle du réacteur Tumanski R-11F.

 

Pourtant, la rupture de 1962 entre les deux grandes nations communistes, qui, de proches alliés devinrent de féroces rivaux, entrava gravement la poursuite du programme. Seuls une poignée d’exemplaires, dénommés J-7, le vocable J se référant à  Jianjiji, pour chasseur, furent assemblés dans les années qui suivirent. Une nouvelle version, développée localement et se caractérisant par l’ajout d’un second canon de 30mm visant à corriger l’armement insuffisant qui constituait l’une des faiblesses majeures du MiG-21F-13, fut produite en petite quantité à partir de 1967 et désignée J-7I.  Une douzaine de J-7I furent livrés à l’Albanie, pour des raisons politiques car ce petit pays communiste avait lui aussi rompu avec l’URSS quelques années auparavant, et s’était tourné vers Beijing afin d’obtenir de nouveaux armements, devenant ainsi le premier client export pour l’une des variantes chinoises du MiG-21.



Sous les cocardes égyptiennes



Cependant, à partir de 1966, la « grande révolution culturelle prolétarienne » désorganisa la société chinoise et eut des effets également désastreux sur l’industrie aéronautique locale, dont les progrès furent considérablement ralentis, avec pour effet qu’une nouvelle variante du chasseur, le J-7II, n’apparut qu’en 1978, année où il effectua son premier vol.  Cette version incluait un réacteur plus puissant ainsi que plusieurs autres améliorations mineures, et fut aussi la première à être exportée sur le continent africain, sous la désignation de F-7B, qui se caractérisait également par sa capacité à être équipée de missiles air-air Magic I d’origine française. 

Une paire deF-7B égyptiens en 2009, à proximité de Hurghada (Bloodknight via wikicommons)
 


Au début des années 70, l’Égypte avait progressivement pris ses distances avec l’URSS, jusqu’alors son principal fournisseur d’armements, puis s’était rapprochée des États-Unis, notamment du fait des accords de Camp David de 1978. L’arsenal des forces armées égyptiennes restait pourtant très largement d’origine soviétique et l’Egyptian Air Force (EAF)  se tourna ainsi vers la Chine, dans un premier temps afin d’obtenir des pièces détachées destinées aux MiG dont elle était équipée. Cette coopération alla en s’intensifiant avec une première commande de 40 chasseurs F-6 et FT-6, la version chinoise du MiG-19 et son dérivé biplace respectivement, en 1976, et dont la livraison intervint en 1979, suivie par une seconde portant sur cinquante appareils du même type, assemblés localement, entre 1982 et 1983. Dans le même temps, les Égyptiens livrèrent à  Beijing plusieurs exemplaires de MiG-23 - dont ils n’avaient pas l’utilité du fait de la complexité de ce modèle et du faible nombre reçus - et de MiG-21MF d’origine soviétique. Ce dernier modèle de chasseur fut à l’origine du développement en Chine d’une nouvelle variante du J-7, le J-7III, qui s’avéra cependant être une déception et n’entra en service que dans l’aviation chinoise.

 
 
Un autre F-7A égyptien (via Egyptdailynews.com)


En 1980, l’EAF reçut trente F-7B, puis, en 1982, un nouvel accord fut conclu portant sur l’assemblage de 80 nouveaux exemplaires du chasseur dans le pays, dont trente étaient destinés à l’Iraki Air Force. L’ensemble de l’opération fut réalisée grâce à des financements saoudiens. L’acquisition par l’EAF de F-7B peut surprendre puisque celle-ci avait accès à des appareils beaucoup plus performants ; l’EAF reçut par exemple ses premiers F-16A dès 1982. La réponse à ce paradoxe réside dans le fait que l’aide américaine, aussi conséquente soit-elle, était insuffisante pour permettre un renouvellement rapide des parcs d’aéronefs avec des appareils de nouvelle génération. Dans le même temps, les F-7B, peu onéreux, permettaient de « faire nombre », et ce d’autant plus que ce modèle de chasseur était extrêmement  facile à intégrer pour une force aérienne habituée à mettre en œuvre des MiG-21 d’origine soviétique depuis près de deux décennies, au cours desquels elle avait développé les infrastructures et les savoir-faire nécessaires à leur entretien et, de manière générale, leur mise en œuvre.

 

Dans les cieux d’Harare



Le second acquéreur africain du F-7 fut l’ancienne Rhodésie, rebaptisée Zimbabwe après la victoire politique des mouvements insurgés contestant la domination de la minorité blanche. Si l’évolution politique qui découla des accords de Lancaster House de 1979 fut radicale, l’Air Force of Zimbabwe (AFZ) maintint avec succès une continuité institutionnelle avec l’ancienne Rhodesian Air Force et conserva le professionnalisme et les savoir-faire de cette dernière, avant de se moderniser partiellement grâce à l’achat de nouveaux équipements au cours des années 80. 

F-7II de l'AFZ. Ils étaient peints en blanc durant les premières années de leur carrière (via xairforces.com)
 



Cependant, le Zimbabwe était rapidement entré dans une période de guerre froide avec l’Afrique du Sud, qui vivait encore sous le régime de l’Apartheid. Cette dernière mena plusieurs opérations de déstabilisation contre Harare au cours de cette décennie, tandis que des troupes zimbabwéennes étaient déployées au Mozambique afin d’y soutenir un gouvernement aux abois face à des insurgés massivement soutenus par Pretoria.  Le risque d’une guerre ouverte contre le puissant voisin austral s’avéra suffisamment prégnant pour que l’AFZ résolve de se doter d’une capacité qui lui faisait alors défaut  - assurer des missions de défense aérienne -  et se tourna vers la Chine pour ce faire. En effet, le ZANU-PF, le parti de Robert Mugabe, avait bénéficié du soutien chinois durant les années de guérilla, et après, son arrivée au pouvoir, les relations avec Beijing continuèrent à être excellentes, se concrétisant dès 1981 avec la commande de véhicules de transport de troupes Type 63.



Ainsi, à la fin des années 80, l’AFZ reçut ainsi douze Chengdu F-7II et F-7IIN, produits en 1986, et assemblés au Zimbabwe par des personnels chinois. Ceux-ci étaient basés sur le F-7M Airguard, un développement du F-7B dont la part de l’avionique d’origine occidentale avait encore été accrue.  Deux FT-5, une version d’écolage biplace du F-5, lui-même basé sur le MiG-17, furent également livrés simultanément afin de faciliter la conversion des pilotes locaux. Les F-7IIN disposent d’une avionique partiellement occidentale et  peuvent emporter une variété d’armements incluant des bombes conventionnelles ou à sous-munitions d’origine soviétique, argentine, britannique ou encore produites localement, ainsi que des paniers lance-roquettes français ou soviétiques. Pour les missions de défense aérienne, ils peuvent être armés de R-60MK soviétiques ou de PL-7 - la copie chinoise du Magic I français. Les deux FT-5 furent ensuite remplacés par une paire de FT-7BZ de conversion opérationnelle.  La livraison des chasseurs ne constituait que la partie la plus visible du contrat passé avec les Chinois. Ces derniers livrèrent également les composants nécessaires à la mise en place d’un réseau entier de défense aérienne incluant plusieurs radars de veille avancée, quatorze centres de communication et de commandement, un centre de maintenance et un réseau permettant d’interconnecter l’ensemble de ces éléments.   

Autre vue, plus récente, d'un F-7 zimbabwéen (via bloggersagitarius.wordpress.com)
 



L’ensemble des F-7 furent affectés au 5th squadron « Arrow », mais ne furent jamais engagés au combat. Un déploiement en République Démocratique du Congo en janvier 2001 tourna cependant au désastre. Une formation de quatre F-7 dépêchés dans ce pays afin de marquer le soutien de Harare au régime de Laurent-Désiré Kabila lors des funérailles de ce dernier à Kinshasa perdit deux de ses appareils dans des accidents. A l’aller, les quatre appareils durent traverser une tempête alors qu’ils effectuaient la dernière étape de leur transit entre les aéroports de Kananga et N’Djili. Un des pilotes, pourtant expérimenté, fut désorienté et dut s’éjecter, condamnant ainsi l’appareil. Un autre incident survint lors du vol retour, lorsque l’un des pilotes se posa sur le ventre à Kananga, bloquant la piste. L’un des ailiers dut alors de poser sur la moitié de la longueur de la piste, faute de de disposer de kérosène en suffisance pour se détourner vers un autre aéroport, parvenant ainsi à sauver son appareil, qui subit cependant des dommages mineurs à cette occasion.  A l’heure actuelle, et malgré un contexte politico-économique catastrophique dans le pays depuis plus d’une décennie, l’AFZ parvint à garder ses F-7 opérationnels, et ces derniers continuent à offrir au Zimbabwe  une capacité d’interception limitée.    



Génération 2.0



A la fin des années 80, Chengdu Aircraft Corporation développa une nouvelle variante du J-7 ;  le J-7E, qui fit son premier vol en 1990 puis entra en production en 1993 et fut livré à 263 exemplaires à l’Armée Populaire de Libération jusqu’en 2002. La principale innovation du J-7E fut l’adoption d’une aile à double-delta  qui augmente la surface alaire de l’avion de 8.17 % comparé aux versions antérieures. Il se caractérise également par l’adoption d’une nouvelle variante plus puissante du réacteur WP-7, le WP-13F, et de gouvernes automatiques. Le J-7E fut proposé à l’exportation sous la désignation de F-7MG et fut introduit auprès du grand public lors de l’édition de novembre 1996 du Zuhai Air Show. Armé d’une paire de canons de 30mm, le poids à vide l’appareil est de 5'292 kilos et sa longueur atteint 8.32 mètres, pour une surface alaire de 24.88m2, alors que l’accroissement du volume de carburant embarqué grâce la présence de réservoirs dans les ailes lui permet un rayon d’action opérationnel de 650 kilomètres avec trois réservoirs largables et une paire de missiles air-air. Comme de coutume avec les version exports, le F-7MG se différencie du J-7E par l’inclusion d'une avionique d'origine occidentale. 

FT-7NI, peu après son entrée en service, en 2010 (Gar3th (talk) via wikicommons)
 

 En juillet 1997, une équipe d’évaluation de la Pakistan Air Force, qui alignait déjà le F-7P,  une variante du F-7M, fut envoyée en Chine afin de tester le F-7MG. Les deux pilotes pakistanais menèrent une douzaine de vols d’essai et confirmèrent l’amélioration significative des performances offertes par le nouveau chasseur. Ainsi, les vitesses de décollage et d’atterrissage du MG étaient inférieures respectivement de 30 et 20km/h à celles du M, alors que le taux de virage  était lui aussi bien meilleur et se rapprochait de celui d’un avion comme le F-16A.  Dans le même temps, le réacteur plus puissant permettait une diminution de 25 % du temps d’accélération de 500 à 1'100 km/h.  Par ailleurs, l’industrie aéronautique chinoise en général, et CAC en particulier, étaient entrés dans une phase de modernisation de son appareil de production, notamment grâce à l’achat de nouvelles machines-outils.  Ainsi,  la qualité de fabrication des J-7E/G et F-7MG produits durant les années 2000 est très supérieure à celle des J-7II, F-7B et F-7M assemblés durant les années 80. Jusque-là, et du fait de la faiblesse de nombre de composants, la mise en œuvre des F-7 demandait en effet une maintenance intensive et des révisions régulières et intégrales des cellules et surtout des réacteurs, avec pour corollaire une réduction de la disponibilité opérationnelle.



Double-deltas sur la Namibie, le Nigeria et la Tanzanie



La Namibie accéda à l’indépendance très tardivement le 21 mars 1990 et ne disposait que de forces armées embryonnaires. Dans les années suivantes, ces dernières furent dotées d’une branche aérienne, le Namibia Defence Force Air Wing qui devint la Namibian Air Force le 13 mars 2005. Au début des années 2000, du fait des expériences issues d’un court conflit frontalier avec le Botswana  durant lequel l’espace aérien national fut violé à maintes reprises, ainsi que du déploiement d’un petit contingent en République Démocratique du Congo, décision fut prise de doter le pays d’une escadrille d’avions de combat, et de se tourner vers la Chine, où un groupe de cadets avait déjà été envoyé en 2000 afin d’y suivre un cursus de formation organisé par la China National Aero-Technology Import & Export Corporation  à l’aide de Nanchang CJ-6 et de Karakorum K-8. 

Un des "Double-Delta" namibiens au décollage (via wikiwand.com)
 



En 2004, Windhoek passa commande de douze F-7NM et deux FT-7NM. Ces appareils, basés sur le F-7MG, sont équipés de sièges éjectables Martin Baker, d’un radar Grifo NG d’origine italienne, d’une avionique incluant une plate-forme de navigation et d’attaque couplée avec un GPS ainsi que d’un RWR digital. Outre leurs deux canons de 30mm, ils peuvent être armés de missiles air-air PL-9, la version chinoise du Python III israélien, de bombes de 250 kilos, et de paniers de roquettes de 80mm à six coups.  Les deux premiers appareils furent livrés par air, au moyen d’un Antonov 124, le 23 février 2005, alors qu’un premier groupe de cinq pilotes acheva un cours de conversion d’une durée de trois mois à la fin du mois de mars 2005, alors qu’un second groupe terminait le sien à la fin du mois d’août de la même année. L’ensemble des F-7NM avait été livré à la fin de l’année suivante, tandis que deux autres groupes de pilotes avaient achevé leur conversion sur l’appareil, l’ensemble permettant l’activation du 23rd squadron de la Namibian Air Force.

 

 
Une paire de F-7 de la NAF en 2012, mettant en évidence la configuration des ailes (Kenneth Iwelumo via wikicommons)


Le Nigéria fut le quatrième pays africain à acquérir des F-7, avec une commande de douze F-7NI et trois FT-7NI annoncée en septembre 2005, pour un montant de 220 millions de dollars américains. Un groupe de pilotes fut envoyé en Chine en 2008 pour s’y former sur l’appareil alors que les  livraisons commencèrent en décembre 2009, suivies quatre mois plus tard par son entrée en service officielle au sein de la Nigeria Air Force (NAF), au sein du 64th Air Defence Group. L’armement des appareils fit l’objet d’un contrat séparé de 32 millions de dollars incluant la livraison de 30 missiles air-air PL-9, dont dix d’entraînement, et une cargaison de bombes et de rockets. Malgré l’expérience des Nigériens -  le 64th Air Defence Group avait également été le principal récipiendaire des 30 MiG-21MF et UM livrés en 1975 ainsi que des 14 MiG-21Bis et UM acquis en 1984 – l’introduction du chasseur chinois fut difficile. Un F-7NI s’écrasa ainsi le 22 mars 2011, tuant son pilote, alors qu’un FT-7NI fut détruit à son tour le 11 mai de la même année, l’équipage parvenant cependant à s’éjecter. Avec l’escalade du conflit contre le mouvement Boko Haram au cours des dernières années, la NAF fut à son tour de plus en plus impliquée, menant de nombreuses missions d’appui et d’interdiction. Les F-7NI furent engagés à leur tour, en sus des Alpha Jet et des hélicoptères de combat, à partir du mois d’août 2015. Plus récemment, la NAF confirma avoir utilisé ses F-7 pour attaquer des dépôts utilisés par les insurgés le 11 avril 2016.



Le dernier client en date fut la Tanzanie, qui entretient avec Beijing des liens privilégiés en matière de défense depuis la fin des années 60. En 1970 déjà, les Chinois avaient construits la base aérienne de Ngerengere, puis fourni des quantités comparativement importantes d’armements divers à la Tanzanie durant la décennie suivante, alors que cette dernière cherchait à accroître le potentiel des Jeshi la Wananchi la Tanzania (Forces populaires de défense de la Tanzanie ; JWTZ) du fait de la menace présentée par l’Ouganda d’Idi Amin Dada. 

Un des quelques F-6 remis en service par la Tanzanie entre 2006 et 2008 (via forum.keypublishing.com)
 

 

Les JWTZ se dotèrent dès 1964 d’une branche aérienne, la Usafirashaj wa Anga. Celle-ci connut une montée en puissance particulièrement rapide et reçut, à partir de 1973, 12 chasseurs F-6 et une vingtaine de FT-5. L’année suivante, ce fut l’URSS qui fournit 14 MiG-21MF et deux MiG-21UM. L’apparition quasi-simultanée de ces appareils dans l’arsenal tanzanien fut très probablement à l’origine de rapports erronés, mais toujours régulièrement cités, faisant état de la livraison par la Chine de F-7A de première génération. En revanche, une deuxième tranche de F-6 et plusieurs FT-6 entrèrent en service durant les années 80. L’ Usafirashaj wa Anga connut son zénith durant la guerre du Kagera contre l’Ouganda avec l’équivalent de deux escadrons de chasse et d’attaque opérationnels, mais un manque de ressources financières chronique l’entraînèrent dans un profond déclin la décennie suivante, les derniers MiG-21 opérationnels étant retirés du service en 1993. Pourtant, le petit service connut une entame de résurrection entre 2006 et 2008 lorsque une petite dizaine de FT-5, F-6 et FT-6 furent remis en état de vol avec l’aide de techniciens chinois ou nord-coréens.



Surtout, cette volonté de remontée en puissance se traduisit par une commande passée en 2009 portant sur l’achat de douze F-7TN et deux FT-7N, qui furent livrés à partir de l’année suivante. Cette version du F-7G est équipé d’une avionique incluant le radar d’origine chinoise KLJ-6E, supérieurs aux Grifo emportés par les F-7 Namibiens et Nigérians. L’ensemble de ces chasseurs est mis en œuvre par la Brigade 601, responsable de l’emploi de tous les avions militaires de l’ Usafirashaj wa Anga, récemment rebaptisée Tanzania Air Force Command (TAFC).  La Brigade 601 perdit un appareil le 27 février 2015 lorsque le pilote d’un F-TTN fut contraint à l’éjection après que l’ingestion d’un volatil ait endommagé le réacteur de l’avion.

 

Conclusion

 

Du point de vue des acquéreurs, le recours aux F-7 offre nombre d’avantages. Ainsi, le Zimbabwe et la Namibie ont pu se doter de capacités d’interception et de défense aérienne qui leurs faisaient défaut, tandis que le Nigéria et la Tanzanie ont pu remplacer à moindre coût leurs appareils d’ancienne génération, pour la plupart non-opérationnels depuis des années, voir des décennies. En effet, il convient de souligner que le prix d’achat de 251 millions de dollars relatif aux 15 F-7 nigérians et de leurs armements  - moins de 15 millions de dollars par appareil hors-armements – est pratiquement imbattable pour des appareils neufs. A titre de comparaison, la Suisse s’était vu offrir 22 Gripen E/F, aux capacités certes infiniment supérieures, pour plus de trois milliards de dollars. Même si d’autres avions comme le F-16 Block 50 ou le Su-30 sont à priori moins onéreux que l'avion suédois, l’écart de prix est gigantesque. Si les capacités de ces chasseurs occidentaux et russes sont sans comparaison avec les F-7 de dernière génération, ils sont financièrement inabordables pour nombre de pays africains. La Tanzanie avait ainsi refusé une offre russe portant sur l’achat de MiG-29 de seconde main, considérée comme trop onéreuse, avant de se tourner vers la Chine.

Un F-7TN, flambant neuf (via www.nairaland.com)

 

Néanmoins, et malgré ces avantages, les F-7G restent avant tout une version très modernisée des antiques MiG 21F-13 et ont donc hérités de certains défauts majeurs propres à leur ancêtre, et qui s’avèrent particulièrement rédhibitoire dans le contexte africain, caractérisé par l’immensité des espaces  associé à une faible densité en termes d’infrastructures de soutien. Le premier est propre au système d’arme de l’appareil car la forme du nez limite la taille du radar embarqué, rendant le chasseur d’autant plus dépendant  du guidage fourni par des radars terrestres, alors que dans les mêmes temps, la couverture prodiguée par ces derniers est généralement très parcellaire. De nombreuses zones du continent africain sont à cet égard de véritables trous noirs. De plus, l’autonomie des F-7 est dans l’absolue très réduite, ce qui représente là aussi une entrave majeure dans le contexte africain, où le nombre d’aéroports adéquats reste limité.  Ainsi, confrontée à ces limitations alors qu’elle utilisait ses MiG-21Bis pour lancer des frappes contre la Lord Resistance Army, l’Ugandan Army Air Force opta pour l’acquisition de Su-30MK2, bien plus adaptés, mais aussi infiniment plus coûteux.



Cette option ne lui fut accessible que grâce à l’exploitation nouvelle de gisements pétroliers qui accrurent soudainement les revenus du pays, mais reste hors de portée pour la plupart des autres nations de l’Afrique noire. Aussi, l’alternative se présentant à leurs forces aériennes revient à choisir entre une lacune capacitaire totale induite par un renoncement à une classe spécifique d’avions de combats ou disposer d’une capacité très lacunaire, mais finalement abordable. Hors, force est de constater que l’industrie aéronautique chinoise est l’une des rares à avoir été en mesure de proposer un produit adapté à ce marché de niche.

 

Le nombre de F-7 exportés vers l’Afrique reste dans l’absolu réduit, avec, si l’on fait abstraction de la centaine de F-7 égyptiens, une petite soixantaine d’exemplaires livrés au cours des deux dernières décennies - Il s’agit là d’une quantité bien inférieure à celle des MiG-21MF et Bis entrés en service sur le continent depuis les années 70.  Cependant,  il convient de garder à l’esprit que les chasseurs ne constituent que la partie la plus visible de l’ensemble des transferts d’armements. Ainsi, tous les acheteurs africains de F-7, à l’exception du Nigéria, ont également acquis des Karakorum K-8 d’entraînement avancé. Dans le même temps, le Nigéria, la Namibie, la Tanzanie et le Zimbabwe ont également reçus des matériels de combat terrestres. L’ère du F-7 est cependant arrivée à son terme et ce modèle n’est actuellement plus proposé à l’exportation. Si les Chinois peuvent proposer  le JF-17, développé conjointement avec le Pakistan, et souvent considéré comme équivalant aux F-16 de première génération, l’appareil est équipé d’un réacteur RD-93 russe. A l’heure actuelle, il est difficile de déterminer si cette dépendance envers Moscou en terme de motorisation est susceptible d’entraver d’éventuelles ventes à l’export, particulièrement dans le cas où JF-17 se trouverait en compétition avec des appareils d’origine russe. Cette dépendance est néanmoins transitoire car une solution alternative sous la forme du réacteur WS-13E devrait devenir disponible dans les années à venir.



Au demeurant, le segment des appareils de combat neufs mais « lowcost » voit apparaître de nouveaux concurrents, en l’occurrence la Corée du Sud, qui propose le FA-50, même si ce dernier ne représentera pas pour autant une alternative aussi accessible que les appareils chinois puisque l’avion d’attaque coréen est très dépendant des technologies américaines, Washington disposant  ainsi de facto d'un droit de véto quant à d'éventuelles ventes. De fait, le marché des avions de combat neuf reste indissociable et ne se comprend que dans le contexte de facteurs géopolitiques plus globaux.

 











Bibliographie

Andreas Rupprecht et Tom Cooper, Modern Chinese Warplanes, Combat Aircraft and Units of the Chinese Air Force and Naval Aviation, Harpia Publishing, 2012



Tom Cooper et Peter Weinert, avec Fabian Hinz et Mark Lepko, African MiGs Vol. 1 - Angola to Ivory Coast - MiGs and Sukhois in Service in Sub-Saharan Africa, Harpia Publishing, L.L.C, 2010



Tom Cooper et Adrien Fontanellaz, War and Insurgencies of Uganda, 1971-1994, Helion & Company, 2015



David Nicolle et Tom Cooper, Arab MiG-19 and MiG-21 Units in Combat, Osprey publishing, 2004



Ressoures internet; Global security, defenceweb.co.za, SIPRI, Bellnaija.com,  Premiumtimesng.com et Naij.com


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